Une requête contre le blocage des prisons
Article publié dans le OF le 27 janvier 2018:
Mercredi, sept familles de détenus du centre pénitentiaire de Rennes-Vezin ont porté plainte au commissariat pour protester contre la privation des droits dont souffrent actuellement leurs proches emprisonnés.
Une femme, venue de Carcassonne, a fait le trajet pour rien. Les parloirs étaient annulés à cause du blocage des surveillants. Une épouse a aussi fait le voyage de Suisse inutilement.
« C’est une grave atteinte à la dignité humaine, dénonce Me Jean-Guillaume Le Mintier, avocat. Les détenus ne peuvent plus voir leur famille, ne vont plus au travail, ne peuvent plus cantiner. Ils sont confinés dans leur cellule, tous les jours, depuis le début du mouvement des surveillants, sans promenade, sans voir la lumière du jour. »
L’avocat et une consoeur, Me Marie-Bénédicte Lusteau, ont déposé, hier après-midi, une requête en référé liberté devant le tribunal administratif de Rennes. La juridiction dispose de deux jours pour réagir. « Nous demandons au tribunal de faire cesser le trouble et de rétablir les droits fondamentaux des détenus, poursuit Me Le Mintier. Une expertise devra être faite, à la demande du juge, pour vérifier sur place la véracité de nos griefs. »
Dans sa requête, l’avocat décrit les conditions de détention que son jeune client, condamné à plusieurs années de prison, a dû supporter pendant des jours. « M. B. est enfermé dans sa cellule dans des conditions sanitaires et inhumaines déplorables. Les poubelles ne sont plus ramassées, il n’a plus accès à la promenade, ni aux parloirs des familles et des avocats. »
« La vulnérabilité des détenus »
Certains détenus n’ont pas pu cantiner, comme ils le font toutes les semaines. Pas de cigarettes, donc, et, surtout, pas les denrées qui viennent améliorer l’ordinaire et qui constituent parfois un véritable repas. « Les surveillants ne se rendent peut-être pas compte, mais ils ne pensent pas aux conséquences sur certains détenus. En prison, tout est important », estime une mère de famille, dont le fils purge une peine à Vezin.
Toutes ces raisons ont donc motivé la requête au tribunal administratif. « Si on considère la vulnérabilité des détenus et leur situation d’entière dépendance vis-à-vis de l’administration, il appartient à celle-ci, et notamment aux directeurs des établissements, de prendre des mesures pour éviter tout traitement inhumain ou dégradant afin de respecter les principes de la Convention européenne des droits de l’homme », écrit Me Le Mintier.
« La vie a en effet été perturbée, reconnaît Anne-Sophie Cortinovis, directrice interrégionale d’administration pénitentiaire. Peu de camions ont pu entrer lors des blocages et la distribution des produits ne s’est pas faite aussi rapidement. Les piquets de grève se lèvent peu à peu, le retour à la normale est progressif. »
Une requête a déjà été déposée, jeudi, au tribunal administratif de Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme). Les juges l’ont rejetée.